jeudi 13 janvier 2011

Chapitre II : Les premiers pas ou l'art du check in

Croyez vous sincèrement qu’on ne m’a pas prévenu de votre arrivée triomphante en limousine blanche six portes au Martinez, la semaine dernière… ?
Eh bien,  quelle faute de goût, laissez donc ces frasques à des chanteuses à voix canadiennes ! Et profitez des palaces avec une classe bien plus discrète mais aussi plus affirmée !
Révisez bien le premier chapitre du Petit Guide du savoir vivre dans un Palace avant de passer au second, je vous prie.

Nous avions  déjà commencé à l’aborder dans le chapitre précédent, dès que vous pénétrez dans un Palace, vous vous devez d’arborer un sourire fier et un regard ombrageux, tel un toréador acclamé par la foule qui pénètre l’arène.
Vous déclamerez tel un comédien de la Comédie Française, un bonjour tonitruant qui fera que l’on s’occupera de vous à la seconde.

Si vous êtes à l’étranger, ne faîtes aucun effort pour parler la langue du pays, déjà, parce que vous avez suivi un enseignement des langues étrangères en France et que vous êtes donc incapable d’aligner trois mots dans une conversation courante et d’autre part,  sachez que c’est au personnel polyglotte que l’on reconnaît la qualité d’un hôtel d’exception. Donc le minimum d’efforts pour le maximum de plaisir.

Si vous devez engager une conversation en anglais ou en télougou, manifestez donc très vite votre agacement, et comme, je vous le rappelle, vous êtes d’origine française, c’est une chose si facile pour vous, voire quasi innée.
Il faut  en effet savoir que le fait d’être colérique et hautain est  très certainement l’une de nos plus grandes qualités, reconnue par nos voisins étrangers dès lors que nous franchissons nos frontières.
Manifester un agacement dès le check in, permet surtout d’être catalogué comme ‘client pénible’ et vous devriez alors recevoir durant votre séjour toute une foultitude d’attentions comme la meilleure table au bord de la piscine pour le déjeuner, deux à trois chocolats en plus au moment de la couverture, voire un verre de champagne servi à votre arrivée en chambre.
En revanche, sachez surtout être juste, si le personnel est irréprochable, point n’est besoin de se montrer bêtement hostile, c’est ça, aussi, l’attitude dans un Palace.

Dans certains endroits, on vous laissera patienter comme un gros nigaud devant le comptoir. Ce qui est proche, vous l’avouerez, de l’inadmissible, commencez déjà à convoquer la Presse pour faire éclater le plus grand scandale du siècle. Ameutez même la Presse Internationale…et vous serez alors fiché comme ‘le client le plus pénible de la journée’.

Ce titre vous permettra de demander à changer d’étage, changer de chambre, être surclassé,  exiger qu’on vous serve une marque d’eau rare et introuvable, que votre ménage soit fait par une gouvernante berbère blonde hispanophone. Bref, demander l’impossible, et sachez que dans les Palaces, ce terme n’existe pas.

Certains hôtels proposent un check in directement en chambre, mais c’est encore très rare, le plus souvent, il se fera à la réception de l’hôtel et certains établissements ont mieux pensé leur check in que d’autres.
Au Martinez ou au Grand Hôtel de Saint Jean Cap Ferrat, vous pourrez ainsi procéder aux différentes étapes de prise de possession de votre chambre, confortablement assis et installés à l’écart des regards indiscrets.
Pensez à préparer votre carte de crédit, dont l’hôtel fera une empreinte.
S’il vous prenait l’envie de vous échapper en pleine nuit, une fois que vous aurez dévalisé le mini bar. La note à 250€ pour frais de boissons dans des contenants ridicules, le peignoir à 100 € et la lampe de chevet que vous aurez voulu emporter dans vos malles, vous seront immédiatement débités de votre compte, avant même votre arrivée à l’aéroport.
Une pièce d’identité peut être demandée dans certains établissements pour bien vérifier que vous avez une origine, et que vous ne faîtes pas partie de ces gens du voyage, que l’on préfère voire dans des jolies roulottes à lampions que dans  des suites présidentielles.

La fiche traditionnelle de renseignements est désormais, en général, pré remplie avec vos noms, adresses et dates de naissance, vous n’aurez plus qu’à apposer votre signature et ce document  sera scanné aussitôt et transmis dans la seconde à la CIA .

Ce genre d’opérations est d’une simplicité enfantine, mais profitez surtout de ce moment privilégié avec le réceptionniste pour lui  faire part de toutes vos exigences.
L’idéal est d’adresser par mail vos désidératas avant votre arrivée, mais si vous étiez en congrès interplanétaire, vous n’en aurez peut être pas le temps.
Parlez donc de vos allergies alimentaires, respiratoires ou émotionnelles, de vos préférences pour tels quotidiens locaux ou nationaux, de votre envie de n’être dérangé sous aucun prétexte et de toutes ces petites choses qui pourront égayer votre séjour, comme un lait de yack pour votre petit déjeuner du lendemain. Gardez vos préférences sexuelles pour vous quand même, le réceptionniste n’a peut être pas besoin de tout savoir.
Sachez que ce dernier est certainement votre ami le plus fidèle dans un  hôtel, celui qui peut centraliser toutes les demandes et les diffuser à l’ensemble du personnel.
Donc, souriez, parce que vous êtes non seulement filmé par les caméras de surveillance, mais aussi parce que vous êtes en vacances et que vous avez potentiellement un  nouvel ami Facebook en face de vous, ce qui portera votre liste à 185 amis, deux de plus maintenant que votre collègue de bureau, et ça, voyez vous, ça n’a pas de prix.


Cher ami vacancier, maintenant, que l’hôtelier a pris connaissance des seize chiffres de votre carte bancaire, et qu’il peut donc l’utiliser frauduleusement pour faire des achats douteux sur le net.
Vous aurez le privilège d’être accompagné jusqu’à votre chambre. On vous fera faire le tour de l’établissement comme à un  malade qui découvre son sanatorium, ou une vielle personne , qui ne sent pas toujours très bon, et que l’on confie à une maison de retraite, en la rassurant « Tu vois bien, Jacqueline, que tu seras bien ici. »
Sauf qu’un hôtelier d’un établissement de prestige a certainement plus d’atouts qu’un directeur de maison de retraite. Salles de restaurants avec des lustres pimpants, spas luxueux, jardins luxuriants, et tentures lourdes vous feront certainement bien plus d’effet qu’une salle de réfectoire défraîchie, et une chambre tristounette.     Allez, n’y pensez pas voyons, ça sera pour bien plus tard.

Les visites d’établissements sont plus ou moins complètes, n’hésitez donc pas à poser des questions plus ou moins idiotes et à demander à visiter avant de vous installer en chambre les différents espaces qui vous intéresseraient.

L’accompagnement en chambre peut varier là encore d’un établissement à un autre.
Certains membres du personnel vous expliquent toutes les fonctionnalités de votre chambre dans les moindres détails, allant même jusqu’à actionner les robinets de la baignoire, comme si vous n’en aviez encore jamais vu, ou à faire une démonstration d’un dépôt dans le coffre-fort privatif de votre future chambre.
N’y voyez pas une manœuvre sournoise, pour vous dévaliser par la suite, puisque, comme vous avez vu tous les épisodes de Mac Gyver, vous savez parfaitement, qu’il vous faudra pianoter votre code de sécurité, les mains gantées pour ne laisser aucune de vos empreintes sur les touches. 
La personne qui vous accompagne en chambre vous explique généralement toutes ces choses en détail pour vous éviter de passer par la suite votre temps au téléphone, en vous plaignant que le coffre fort ne fonctionne pas, qu’il n’y a pas d’eau pour la baignoire, ou que vous ne trouvez pas le mini bar.
Si tel est le cas, c’est que vous aurez fait comme dans l’avion,  que vous n’aurez pas suivi les conseils de sécurité expliqués par l’hôtesse et pourtant, sachez que chaque chambre est différente, que les robinetteries  sont parfois complexes dans leur maniement, et que vous avez dans votre chambre, votre nouvel ami Facebook, alors, je vous prie de bien vouloir l’écouter, s’il vous plait.
Un peu de respect, il y a des gens qui travaillent…enfin !

Si jamais, un élément de la décoration ne vous convenait pas, ou l’orientation de votre chambre n’était pas à votre goût, commencez à faire votre plus belle moue d’enfant gâté, et demandez à visiter une autre chambre. Ou prenez vous pour Madonna et demandez à ce qu’on repeigne les murs de votre chambre en rose. Ils le feront, mais ne feignez pas la surprise quand vous verrez apparaître sur la note finale la mention
« Supplément pour caprice »

Si la capacité hôtelière le permet, et si vous pouvez effectivement changer de chambre, le bagagiste  déplacera une nouvelle fois vos quinze malles Vuitton, et là souvenez vous, c’était dans la première leçon, pensez à le gratifier d’un généreux pourboire donné de la main à la main avec un grand sourire complice, comme si vous aviez dans vos bagages les joyaux de la couronne et en plus de la cocaïne pour tout le monde.

Certains établissements pourtant dotés d’une pluie d’étoiles se contentent de vous délivrer les clefs ou même mieux une carte magnétique au comptoir de la réception, en vous expliquant maladroitement comment accéder à votre chambre.

Si tel est le cas, sachez que généralement, le premier chiffre de votre numéro de clef ou de carte correspond en général à l’étage. Une clef de chambre numérotée 525 serait dans la logique des choses, la 25ème chambre du 5ème étage. Une indication par la suite des numéros de chambre à votre sortie de l’ascenseur est généralement prévue pour éviter que vous ne vous  perdiez dans des dédales de couloir, certains établissements, je le rappelle étant relativement vastes.

Voilà, vous êtes enfin dans votre chambre à sauter comme un enfant de quatre ans sur votre lit, veuillez conserver votre calme, car nous allons apprendre dans la prochaine leçon à profiter de toutes les petites astuces pour vous sentir au mieux dans votre nouveau chez vous

Je ne le redirai jamais assez, il vous reste encore du temps, faites vous  donc couler un bain, et plongez y jusqu’au chapitre III, vous verrez, ça fait du bien.

Et combien avez-vous donné au bagagiste, au fait, dîtes moi ?...
Et bien, j’attends…

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